CICE : le scandale qui oblige à conditionner les aides [Edito]

France stratégie a publié mi-septembre un rapport sur l’évaluation du CICE mis en place par le gouvernement Hollande pour le moins surprenant. Que cherche réellement ce rapport avec cette évaluation tardive ?

Tirer des enseignements de la réforme sur le marché du travail, s’interroger sur la distribution des aides publiques ou alerter le gouvernement sur les crispations des Français sur l’absence totale de contrepartie des aides publiques aux entreprises.

France stratégie est une institution, dite indépendante, rattachée au cabinet du premier ministre !

Une mesure lunaire annoncée juste après Noël au seul bénéfice des entreprises !

La réforme du Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE) avait pour objectif de donner des aides publiques par dizaines de milliards d’euros aux entreprises en échange d’une promesse de création d’emplois par centaines de milliers, des hausses de salaire pour les salariés, de l’investissement dans l’outil industriel français ou encore de rendre les entreprises industrielles plus fortes face à la concurrence internationale. Bref, une mesure lunaire annoncée juste après Noël au seul bénéfice des entreprises !

Que dit, cinq ans plus tard, le rapport de France Stratégie ?

Tout d’abord, l’institution évalue les créations d’emplois entre 2013 et 2017 à seulement cent mille emplois, principalement concentrés sur un quart des entreprises françaises, dont une bonne partie des emplois aurait de toute façon été créés ! Pourtant, la réforme a distribué 18 milliards d’euros chaque année, soit 90 milliards d’euros d’aides publiques aux entreprises sur cinq ans.

Le deuxième enseignement tiré de ce rapport est que le CICE n’a absolument pas répondu à l’objectif des entreprises soumises à très forte concurrence internationale.

Les entreprises de services ont été mieux servies que les entreprises de l’industrie. La grande distribution ou la poste ont amélioré légèrement les salaires et l’emploi. Par contre, toutes les entreprises industrielles ont préféré baisser leurs prix de vente pour gagner plus en compétitivité sans investir dans l’outil industriel… et ainsi redistribuer encore plus de dividendes à leurs actionnaires ces cinq dernières années.

Le rapport interroge sur le gros problème qu’est la perception des Français sur l’utilité d’une telle mesure : « les effets du CICE sur l’investissement paraissent nuls ».

Devant ce fiasco, on comprend mieux l’intense lobbying patronal pour transformer ce crédit d’impôt de 18 milliards chaque année, en de nouvelles baisses de cotisations sur la protection sociale.

Heureusement pour le patronat, Macron a exaucé les vœux du MEDEF dès janvier 2018...

Mais peut-être aussi, ce rapport est une manière pour l’institution d’alerter le gouvernement sur l’argumentaire à trouver sur le nouveau cadeau du gouvernement concernant les 20 milliards d’euros supplémentaires d’impôt production en moins pour les entreprises, annoncées ce mois-ci dans le pseudo plan de relance !

Un nouveau désastre annoncé pour nos services publics et notre protection sociale.

La CGT a doublement raison d’exiger des contreparties sur toutes les aides publiques et d’informer plus fortement encore les chômeurs, les salariés et les retraités.

Editorial de Maurad RABHI
Journal Infos THCB - Septembre 2020
 

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