Faire reconnaître une « UES » pour une représentation du personnel adéquate

« L’UES », unité économique et sociale, est une notion dont on entend parler parfois, sans trop toujours savoir ce qu’il en est. Pensée au service des salarié.es et du droit à une représentation du personnel, elle mérite pourtant d’être plus maîtrisée, pour envisager de la mobiliser si besoin.

Créée dans les années 1970 par la jurisprudence, et reconnue par la loi dix ans plus tard, l’UES vise à contrer la manœuvre patronale d’éclater artificiellement une même société en plusieurs petites entreprises, afin d’échapper au seuil fatidique de 50 salarié.es, aujourd'hui de mise en place d’un CSE aux attributions élargies (l’UES peut également permettre d’atteindre le seuil des 11 salarié.es, ce qui imposera alors la mise en place d’un CSE avec attributions restreintes). Par la reconnaissance d’UES, ces entreprises statutairement distinctes vont fonctionner comme une même entreprise pour la mise en place et le fonctionnement du CSE. (Pour les éléments économiques et autres, chaque entreprise reste l’employeur des salarié.es).

À noter que les éléments indiqués ci-dessous valent tant pour la reconnaissance d’une UES que pour l’intégration d’une entreprise à une UES existante.

Les critères de l’UES

Pour reconnaître une Unité Économique et Sociale, il faut, comme son nom l’indique, démontrer l’existence d’une unité économique et une unité sociale.

► Une unité économique. Celle-ci découle de deux critères cumulatifs : une similarité ou complémentarité de l’activité des entreprises et une concentration des pouvoirs de direction envers l’ensemble des salarié.es.

► Une unité sociale. Il s’agit d’une communauté de travailleurs liés par leur statut social et conditions de travail. Ici, pas de critères à remplir nécessairement mais un faisceau d’indices (la présence de l’un ne suffit pas, et son absence peut être surpassée) tels que :  conditions de travail similaires, règlement intérieur identique, accords collectifs communs, politique salariale unique, permutation des salarié.es entre les services…

La reconnaissance de l’UES

Une Unité Économique et Sociale peut être reconnue de deux façons, que le syndicat peut emprunter chacune, au choix. 

Par un accord collectif : l’UES peut être reconnue par accord collectif de droit commun signé avec les organisations syndicales représentatives des différentes entreprises concernées (qui doivent toutes être invitées à la négociation).

Par le tribunal judiciaire : lorsque les employeurs n’acceptent pas de reconnaitre une UES par accord, il est toujours possible de le faire par le juge. Le syndicat, le CSE ou même un salarié peut saisir le tribunal judiciaire, sans avocat obligatoire, pour forcer la reconnaissance d’une UES, dont il aura alors la charge de prouver l’existence par la réunion des critères évoqués.

Les effets de l’UES

Dès qu’elle est reconnue, l’UES impose la mise en place d’un CSE à son niveau. Les mandats éventuellement en cours dans une ou plusieurs des entreprises concernées cessent au jour de ces nouvelles élections.

L’UES fonctionnant « comme une entreprise », elle n’empêche pas l’existence de CSE d’établissement (qui pourront vraisemblablement être mis en place au niveau de chaque
entreprise de l’UES). Cela doit être d’autant plus gardé à l’esprit que des employeurs n’hésitent pas à détourner la finalité de la notion de l’UES dans le sens d’une concentration de la représentation du personnel pour ne pas avoir à mettre en place des CSE dans chaque entreprise de plus de 11 et de 50 salarié.es. 


Source  : Journal du THCB janvier 2024