Activité Partielle de Longue Durée (APLD) - Règles générales
Loi, accord de branche, d’entreprise, document unilatéral : comment ça s’articule ?
- L’APLD est un dispositif créé par la loi, avec des décrets d’application. Ces règles sont « d’ordre public », c’est-à-dire qu’elles fixent des planchers qui doivent toujours être respectés. Exemples : l’indemnité versée au salarié doit être d’au moins 70% de la rémunération brute ; le principe de la limite de la réduction de la durée du travail à 40% de la durée légale et par exception à 50%.
- L’APLD doit être prévu par un accord collectif, de branche ou d’entreprise. Cet accord peut prévoir mieux que la loi. Exemple : une réduction de la durée du travail toujours limitée à 40% sans exceptions.
⚠ Quand existe un accord de branche, un accord d’entreprise est autorisé à y déroger défavorablement. Dans les négociations d’entreprise, il faut penser absolument à regarder ce que prévoit la branche afin de s’assurer que l’accord d’entreprise n’aille pas en dessous.
Dans notre exemple précédent : un accord d’entreprise pourrait venir restaurer la possibilité d’une réduction exceptionnelle de la durée du travail à 50% de la durée légale, contre l’accord de branche. Il faut refuser de signer une telle clause.
- L’APLD est mis en œuvre au niveau de l’entreprise par l’effet soit d’un accord d’entreprise soit d’une décision unilatérale prise en conformité avec l’accord de branche.
⚠ Il faut bien vérifier que la décision unilatérale respecte l’accord de branche, elle n’a pas le droit d’être moins favorable aux salariés.
Qu’est-ce qui justifie le recours à l’APLD ?
L’APLD est un dispositif censé répondre à « des difficultés durables » de l’activité de l’entreprise (baisse conséquente du chiffre d’affaires, explosion de factures énergétiques, perte de clients etc.) mais qui ne sont pas de nature à compromettre sa pérennité (pas de plan de licenciement en vue).
Attention, certaines entreprises sont tentées d’utiliser l’APLD comme un outil de flexibilisation du temps de travail, de régulation de l’activité… Ce détournement du dispositif doit être combattu.
Quelles indemnités et financements ?
- Pour les salariés : la loi prévoit que l’indemnité soit au moins équivalente à 70% de la rémunération brute, ce qui correspond à 84% du salaire net.
Voir spécificités ► APLD TEXTILE
Les périodes chômées ouvrent les droits à la retraite pour le régime général ; les points de retraite complémentaire ne sont en principe acquis qu’au-delà de la 60ème heure indemnisée.
- Pour l’entreprise : l’entreprise reçoit une aide de l’Etat à la hauteur de 85% du salaire brut de la partie non travaillée pour chaque salarié mis en activité partielle.
Jusqu’à quand une entreprise peut-elle recourir à l’APLD ?
Pour entrer dans le dispositif d’APLD pour la 1ère fois, la date limite est le 31 décembre 2022.
Il ne s’agit pas de la date limite d’application des dispositifs APLD mais de la date à laquelle il faut que l’Administration ait autorisé le recours au dispositif.
Les branches ou entreprises engagées dans le dispositif avant le 31 décembre 2022, il restera possible, après cette date, de conclure des avenants et de prévoir des adaptations aux documents unilatéraux.
Comment mettre en place l’APLD ?
- Par accord d’entreprise (qu’il existe ou non un accord de branche)
- Par accord de branche + décision unilatérale conforme
L’accord d’entreprise et la décision unilatérale doivent être transmis à l’Administration pour autorisation (« validation » de l’accord collectif et « homologation » de la décision unilatérale).
Le CSE doit être consulté en cas de décision unilatérale, à défaut l’homologation ne saurait être délivrée par l’Administration.
Pendant combien de temps maximum ?
La durée d’utilisation de l’APLD est de 36 mois maximum, consécutifs ou non, sur une période de 48 mois consécutifs (à partir du 1er jour de l’autorisation administrative, et il se fait en mois civils).
A savoir : l’autorisation administrative de recourir à l’APLD doit être renouvelée tous les 6 mois.
Voir spécificités (liens) ► APLD TEXTILE ► APLD MAROQUINERIE ► APLD HABILLEMENT
Quelles sont les éléments que l’accord (de branche ou d’entreprise) et/ou la décision unilatérale doivent prévoir ?
- Diagnostic sur la situation économique et les perspectives d’activité :
La majorité des accords et documents unilatéraux se contentent d’invoquer de façon très large « la guerre en Ukraine » ou « la crise de l’énergie ». C’est non seulement trop général et pas assez circonstancié vis-à-vis de nos secteurs d’activité et de chaque entreprise mais également trop vague.
A NEGOCIER Des données précises témoignant de la situation économique (par exemple le chiffre d’affaires de l’année en cours par rapport aux deux années précédentes, le niveau du carnet de commandes, le volume des stocks et toutes autres arguments comme la perte de gros clients, etc.). L’idéal est le recours à une expertise qui permette d’établir l’état des difficultés de l’entreprise.
Voir spécificités ► APLD HABILLEMENT
- Date de début et la durée d’application du dispositif
A NEGOCIER Une clause de revoyure dans l’accord, notamment si la situation venait à s’améliorer ou se dégrader. Il faut permettre à l’une des parties signataires d’exiger une renégociation de l’accord, voire même de suspendre ou d’arrêter l’APLD dans l’entreprise. Dans ces cas-là, il faut en informer le CSE et l’Administration.
- Salariés et activités concernées
- Réduction maximale de la durée du travail
⚠ La loi impose une réduction maximale de 40% de la durée légale, appréciée sur la durée de l’accord et par salarié. Elle autorise que la réduction aille jusqu’à 50% de la durée légale, dans des « cas exceptionnels résultat de la situation particulière de l’entreprise » et sur décision de l’autorité administrative.
A NEGOCIER Une limite de la réduction de la durée du travail au maximum à 40%, sans exception.
Voir spécificités (liens) ► APLD TEXTILE ► APLD MAROQUINERIE ► APLD HABILLEMENT
- Engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle
La réglementation nationale souligne l’importance de ces engagements, notamment dans les décisions unilatérales. L’insistance faite par le décret souligne l’importance accordée au fait de prévoir des engagements en matière d’emploi, c’est-à-dire d’assurer le mieux possible aux salariés qu’aucun licenciement ne sera prononcé.
A NEGOCIER Interdire tout licenciement économique pendant la période de l’APLD, ainsi que le recours à des accords tels que les Accords de Performance Collective et les Ruptures Conventionnelles Collectives. Attention aux clauses selon lesquelles aucun licenciement ne sera prononcé SAUF si la situation se dégrade. Il faut lutter contre ce type de clause. Si la situation se dégrade, ce qui doit être prévu c’est la suspension de l’application du dispositif d’APLD lui-même. Il faut prévoir dans les accords, de branche et d’entreprise, mais aussi forcer l’employeur à l’inscrire dans les documents unilatéraux, qu’aucune procédure de licenciement ne peut être engagée en même temps que la mise en œuvre de l’APLD. En cas de licenciements envisagés, le CSE doit être informé et le dispositif d’APLD suspendu.
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- Modalités d’information des organisations syndicales signataires et du CSE (au moins tous les 3 mois selon la loi)
A NEGOCIER Une information au CSE tous les mois.
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Quelles sont les éléments que l’accord (de branche ou d’entreprise) peut prévoir ?
D’après le décret d’application de la loi, l’accord peut également prévoir :
- Conditions dans lesquelles les dirigeants/mandataires sociaux/actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés pendant la durée de recours au dispositif
A NEGOCIER INTERDIRE EXPRESSÉMENT QUE L’ÉQUIPE DE DIRECTION NE S’OCTROIE DE DIVIDENDES, DE PRIME EXCEPTIONNELLE, D’ACTIONS ETC. PENDANT TOUTE LA DURÉE DE L’ACCORD.
Il faut dépasser les déclarations d’intention et les formulations trop vagues pour inscrire noir sur blanc l’interdiction de versement des dividendes et la réelle proportionnalité des efforts.
Voir spécificités (liens) ► APLD TEXTILE ► APLD MAROQUINERIE
- Conditions dans lesquelles les salariés prennent leurs congés payés et utilisent leur compte personnel de formation, avant ou pendant la mise en œuvre du dispositif
Il s’agit d’une suggestion faite par le décret d’application (l’Administration du travail y incite aussi parfois pour valider/homologuer une demande d’APLD) qui est problématique. En effet, le droit au repos, que viennent consacrer les congés payés, jours de RTT etc., implique de pouvoir choisir un minimum quand on les pose… Surtout, ces jours ne sauraient en principe être utilisés par la Direction comme des outils de flexibilité, ce qui risque pourtant d’être le cas dès lors qu’on forcerait les salariés à les poser en cas de réduction d’activité.
Il reste que des accords collectifs peuvent demander que ces jours de congés soient ainsi posés au préalable de l’APLD, comme le prévoit par exemple l’accord de la Maroquinerie. Une telle clause doit être évitée au maximum.
⚠ En revanche, un document unilatéral ne peut pas le prévoir lui-même, c’est-à-dire quand l’accord de branche sur lequel il se fonde ne l’y a pas autorisé. C’est le cas chez TORAY, entreprise du textile artificiel, où la Direction a pris un document unilatéral précisant que les jours de congés et de récupération doivent être posés au préalable de l’APLD alors même que l’accord de branche du Textile ne l’a pas prévu. Aller au-delà de l’accord de branche dans un simple document unilatéral est illégal.
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A NEGOCIER
- Impact des périodes chômées :
Négocier la neutralisation des périodes chômées pour l’acquisition des congés payés et le calcul des indemnités basées sur le salaire.
De façon plus générale, l’idéal est de neutraliser les périodes chômées pour le calcul de l’ensemble des droits et budgets (budget de fonctionnement du CSE et budget pour les « activités sociales et culturelles ») qui dépendent de la masse salariale.
Voir spécificités (liens) ► APLD TEXTILE ► APLD HABILLEMENT